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Logement : que penser des mesures des candidats à la mairie de Paris ?

04 mars 2020 Théophile Robert 156 vues

Les élections municipales de 2020 approchent à grand pas. Si le coronavirus COVID-19 ne retarde pas leur déroulement, les Parisiens pourront choisir leur nouveau représentant les 15 et 22 mars prochains (respectivement premier et second tour). Et à Paris, le logement est une préoccupation de première ligne. Assurland a donc demandé ses analyses à Henry Buzy-Cazaux, président de l'IMSI (Institut du Management des Services Immobiliers).

Les différentes thématiques abordées par les candidats à la mairie de Paris

Les candidats à la mairie de Paris

Pour ces élections municipales de 2020 à la mairie de Paris, nous retrouverons les candidats suivants :

  • Anne Hidalgo (PS) : Paris en commun ;
  • Rachida Dati (LR) : Engagés pour changer Paris ;
  • Agnès Buzyn (LREM) : Ensemble pour Paris ;
  • David Belliard (EELV) : L'Écologie pour Paris ;
  • Cédric Villani (dissident LREM) : Le Nouveau Paris ;
  • Danielle Simonnet (LFI) : Décidons Paris ;
  • Marcel Campion (sans étiquette) : Libérons Paris ;
  • Serge Federbusch (RN) : Aimer Paris ;
  • Christophe Berkani (sans étiquette) : Pari(s) Citoyen.

Logement : quels sujets préoccupent le plus ?

Moult thématiques ont été abordées par ces différents candidats. On retrouve notamment diverses mesures pour répondre à la crise du logement telles que l'encadrement des loyers, diverses aides à la location ou à l'achat, la transformation de bureaux en logements ou encore l'augmentation du taux de logements sociaux (ce taux était à 21,1 % au 1er janvier 2018 ; source : apur.org). La question des logements vacants reste également prégnante ; Airbnb ne laisse pas non plus indifférent et provoque l'intérêt de nombreux candidats.

Certains voient grand et proposent des projets de (très) grande envergure, au coût parfois très élevé. On se rappellera par exemple de la proposition de déplacer la Gare de l'Est de Benjamin Griveaux... qui s'est retiré des élections suite à la diffusion d'une vidéo intime. Enfin, le Grand Paris, projet qui se concrétise de plus en plus a aussi été évoqué.

Des projets pharaoniques pour la capitale

Après que Benjamin Griveaux a retiré sa candidature, Agnès Buzyn a pris le relais pour représenter LREM et a pris quelques distances avec le programme de son prédécesseur. Elle a notamment abandonné l'idée de déplacer la Gare de l'Est, mesure dont le coût était estimé à 1,5 milliard d'euros, ou encore la proposition de verser jusqu'à 100 000 euros d'apport aux ménages de la classe moyenne désirant acheter un logement (2 milliards d'euros au total).

Il reste donc une mesure particulièrement « pharaonique », d'un coût de 20 milliards d'euros : reconquérir 30 000 logements sur six ans pour les revendre avec une décote de 20 % par rapport au marché. Mais cette mesure d'Anne Hidalgo, à l'instar de nombreuses propositions de cet acabit, a grandement été remise en question. « Je suis sceptique sur le réalisme d'engagements de campagne très onéreux, que la situation économique du pays et des collectivités locales risque fort de compromettre », allègue Henry Buzy-Cazaux.

Toutefois, le président de l'IMSI note que « tous les candidats ont fait l'effort de proposer des solutions pour financer leurs mesures. » Anne Hidalgo avait par exemple annoncé au Monde son projet de création d'une société immobilière mêlant public et privé, dotée au départ de « 6 milliards d'euros – dont 1 milliard de la Ville de Paris, 2 milliards d'investisseurs publics tels que la Caisse des dépôts, 3 milliards du secteur privé ». Mais il reste dubitatif : « Quoi qu'il en soit, il y a à la clé de ces grands projets onéreux une accentuation de la dette publique. Et cela présente des dangers. »

Quelles mesures ont été proposées pour résoudre la crise du logement à Paris ?

Le projet de racheter 30 000 logements par Anne Hidalgo est avant tout destiné à résoudre la crise du logement dans la capitale. En effet, avec les hausses suivies du prix du m² en intra-muros, autant à l'achat qu'à la location ont progressivement contribué à chasser les classes moyennes de la ville. Plusieurs propositions ont donc été faites pour permettre à ces classes moyennes de retrouver une certaine sérénité côté logement.

Transformer des bureaux en logements

David Belliard et Anne Hidalgo proposent par exemple de transformer des bureaux en logements. Mais pour Henry Buzy-Cazaux, une telle mesure n'est guère viable. « Ce qui est original, c'est le renoncement aux constructions élevées et à la densification, au profit de la mobilisation des bureaux vacants pour les transformer en logements, explique-t-il. C'est irréaliste : Paris a besoin de son stock de bureaux, qui est aujourd'hui faible par rapport aux besoins. D'autant que les besoins en bureaux à Paris sont considérables et que le stock n'est absolument pas pathologique (environ 2 % du parc total) », ajoute-t-il.

En outre, le coût d'une telle mesure resterait très élevé. « Le coût de transformation est important et il est illusoire de penser que des investisseurs vont procéder aux travaux nécessaires. Quant au foncier, la difficulté de faire bouger les propriétaires publics est telle que la mandature n'y suffira pas ! On peut le regretter », achève le président de l'IMSI.

Des aides à la location

De façon très pragmatique et dans l'imaginaire collectif, répondre au problème du logement passe souvent par des propositions d'aides financières. Rachida Dati a par exemple émis l'idée d'une aide directe de 1 200 euros pendant 3 ans pour chaque nouvel enfant au sein d'un ménage. « L'aide aux familles locataires imaginée par Rachida Dati, si elle ne se double pas d'une condition de ressources, aura plutôt un effet inflationniste sur les loyers, affirme Henry Buzy-Cazaux. J'estime le risque considérable, sauf bien sûr si le plafonnement des loyers est maintenu. »

De son côté, Agnès Buzyn a imaginé une aide un peu plus spécifique et pouvant s'apparenter à une aide financière : garantir un logement à tous les fonctionnaires parisiens. « L'idée est aberrante, lance le président de l'IMSI. C'est un avantage en nature qui ne se justifie que pour ceux qui ont des astreintes de service, et ils sont de moins en moins nombreux. Une telle mesure risque en outre cliver la population et de conduire les travailleurs du privé à regarder les fonctionnaires comme des privilégiés. Le danger de fissurer la cohésion démocratique est considérable. »

Faut-il maintenir l'encadrement des loyers ?

Pour endiguer l'inflation démentielle de la capitale, l'encadrement des loyers avait été proposé en 2017, puis annulé et finalement acté en 2018. De nombreux candidats désirent le maintenir : Anne Hidalgo, Danielle Simonnet, Agnès Buzyn... David Belliard va plus loin et propose même un blocage des loyers. De son côté, Henry Buzy-Cazaux défend les bienfaits de l'encadrement des loyers : « L'encadrement des loyers à Paris n'a absolument pas produit les effets terribles que certains avaient prédit, affirme-t-il. Les investisseurs ne se sont pas enfuis parce que ce mécanisme a seulement permis de ramener à la raison de l'ordre de 25% des loyers. Ces loyers étaient excessifs et le fait de propriétaires gérant directement leur bien. En effet, l'encadrement des loyers n'est pas déconnecté du marché puisqu'il se fonde sur son observation et sur le calcul de valeurs médianes. Il a aussi eu le mérite de calmer les ardeurs a priori et d'apaiser les augmentations. En clair, je ne suis pas de ceux qui considèrent qu'il soit inutile ou nocif à Paris. »

Augmenter le taux de logements sociaux dans la capitale ?

Le logement social est également au programme de nombreux candidats, qui veulent augmenter son taux à 25 % d'ici 2025, voire 30 % d'ici 2030. Mais cela ne devrait pas être sans effet sur les tarifs affichés dans le reste du parc parisien. « Le problème du quota de logements sociaux est qu'il a une incidence sur le prix des logements privés. Dans un programme immobilier, un promoteur a un bilan à équilibrer et, si la proportion de logements au prix moindre augmente, cela rejaillit sur le prix des logements privés. Cette majoration peut ne pas être inflationniste des prix du marché si elle se réalise grâce à des acquisitions diffuses dans le parc existant », note le président de l'IMSI.

Quelles propositions pour répondre au problème des logements vacants ?

Les logements vacants sont un sujet incontournable de cette élection municipale de 2020 à Paris : « La mobilisation du parc de logements vacants est une solution proposée par les responsables politiques de façon lancinante et est d'ailleurs envisagée pour tout le pays », constate Henry Buzy-Cazaux. En mars 2019, la mairie de Paris avait notamment révélé que 17 % des logements étaient inoccupés. Et les arrondissements les plus touchés sont les quatre arrondissements centraux.

Pourtant, un telle mesure pose plusieurs problèmes soulevés le président de l'IMSI :

  • « Le recensement est approximatif et pas du tout fiabilisé. Pour la France, Julien Denormandie parle de 200 000 quand le rapport du député Mickaël Nogal « Louer en confiance » en mentionne 130 000. Il faut commencer par compter.
  • Ensuite, ce sont les logements mobilisables effectivement qui doivent être identifiés. Il ne peut s'agir que de logements volontairement laissés vides par leurs propriétaires et je considère qu'ils sont beaucoup moins nombreux qu'on le prétend. Il faut en effet déflater du nombre total, lorsqu'il sera connu, les logements vacants pour des raisons techniques. Certains ne sont pas habitables en l'état car des travaux doivent y être engagés, tandis que d'autres attendent encore un nouveau locataire (ce second cas de figure est plus rare à Paris).
  • Il y a également des cas de complexité juridique, par exemple liés à une indivision ou à une succession encore non-liquidée. Je crains qu'on ne se paie de mots quand on présente la vacance comme un espoir de trouver des logements pour les familles et les individus. »

Néanmoins, le président de l'IMSI ne serait pas en défaveur d'une taxe sur la vacance. De de côté, Cédric Villani imagine par exemple une fiscalité plus importante sur les résidences secondaires et identifier auprès des propriétaires ce qui les pousse à ne pas louer, pour ensuite leur apporter des solutions d'assurance.

« Le problème, là encore, tient à la difficulté de repérer les propriétaires vraiment passibles d'une taxation », mentionne pourtant Henry Buzy-Cazaux. Pour lui, « les mesures incitatives sont préférables, mais il y faut un marketing puissant. C'est ainsi que le dispositif Multiloc, inventé par Anne Hidalgo avec la FNAIM du Grand Paris et pourtant bien conçu, n'a pas produit les résultats escomptés. Il faut en analyser les raisons mais ne pas pour autant renoncer. En plus, mobiliser doit permettre en même temps d'éradiquer l'insalubrité et l'indignité, ce que faisait ce dispositif, associé à des travaux et à une délégation de gestion à des professionnels. Quant à la menace de réquisition [des logements vacants, ndlr], elle est contre-productive au possible : les investisseurs institutionnels réduiront encore plus leur parc résidentiel et les particuliers choisiront d'autres supports de placement. »

Airbnb : un sujet très en vogue, et pourtant...

Airbnb est lui aussi un sujet particulièrement en vogue ces dernières années. De multiples mesures ont été adoptées pour réduire le nombre de nuitées annuelles autorisées. Mais quelques candidats à la mairie de Paris voudraient encore le réduire (Anne Hidalgo, David Belliard, Cédric Villani, Danielle Simonnet...). Rachida Dati désire quant à elle imposer des justificatifs d'autorisation des loueurs en amont de la mise en ligne d'une annonce de location.

Toutefois, de telles mesures restent très abstraite. « Un maire de Paris n'aura pas le pouvoir de durcir le régime des locations meublées de courte durée, rappelle Henry Buzy-Cazaux. Seule la loi nationale peut le faire, comme dans l'ELAN. Mais je ne trouve pas anormal de vouloir réduire le nombre de nuitées autorisées. Je pense que trois mois seraient corrects. Demander des autorisations aux loueurs n'est pas une mauvaise voie. Je crois surtout qu'il faut améliorer le régime fiscal des loueurs de longue durée de logements vides, pour que la tentation de l'autre formule soit moindre », propose-t-il.

Le Grand Paris, une solution viable pour détendre les marchés du logement à Paris ?

Enfin, un dernier point a été abordé et plus particulièrement par Anne Hidalgo : la relation entre Paris et le « Grand Paris ». Les Jeux Olympiques de Paris approchant à grands pas (2024) et le Grand Paris Express se concrétisant, la question se pose. « L'actuelle maire a raison de considérer que la bonne maille pour apporter des solutions efficaces est davantage le Grand Paris que Paris seule, allègue le président de l'IMSI. L'attractivité croissante de notre capitale soutiendra toujours les prix à un niveau élevé et la ville restera peu accessibles aux moins aisés. Mais quelle importance si des clusters se créent, liés à Paris par des infrastructures de transport, et où il fera bon vivre avec un taux d'effort bien moindre ? Il ne s'agit pas d'assimiler les autres communes, mais de bâtir dans l'espace du Grand Paris, et pas seulement avec les couronnes de proximité. »

« Je regrette cependant que tous les candidats, une fois encore, donnent le sentiment que tous les ménages désireux d’habiter Paris le pourront. La vraie solution pour satisfaire la demande est le Grand Paris, pas Paris. Profiter des atouts de la ville centre sans y vivre et mieux vivre ailleurs », conclut Henry-Buzy Cazaux.

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