L'absence de budget pour 2026 commence à produire des effets très concrets. Le guichet de MaPrimeRénov', principal dispositif d'aide à la rénovation énergétique des logements, sera suspendu dès le 1er janvier. Une décision confirmée par le ministre du Logement, Vincent Jeanbrun, qui acte une nouvelle interruption aux conséquences immédiates pour les ménages comme pour le secteur du bâtiment.
"Pas de budget, pas de guichet" : une suspension assumée par le gouvernement
Invité sur France 3, le ministre du Logement a confirmé ce que l'exécutif laissait déjà entendre depuis plusieurs semaines. "Je l'avais dit : pas de budget, pas de guichet", a-t-il déclaré. En cause, l'échec du Parlement à trouver un compromis sur le projet de loi de finances pour 2026, contraignant le gouvernement à recourir à une loi spéciale.
Cette loi spéciale, appelée à être présentée en conseil des ministres puis adoptée par le Parlement, vise uniquement à assurer la continuité de l'action publique. Elle autorise l'État à percevoir les impôts existants, sans créer de nouvelles recettes, et limite strictement les dépenses aux services jugés indispensables et déjà votés l'année précédente.
Pour Vincent Jeanbrun, le cadre est clair : "On espérait pouvoir redémarrer sur les chapeaux de roues en janvier, en ayant bien dimensionné tout le dispositif, mais effectivement avec une loi spéciale, ça ne sera pas possible, donc on ne pourra pas rouvrir le guichet". Le ministre assume ainsi un arrêt net plutôt qu'une ouverture partielle jugée incohérente.
Une loi spéciale qui bloque toute nouvelle dépense
Le cœur du problème réside dans la nature même de la loi spéciale. "En fait la loi spéciale, ce n'est pas un budget, c'est une espèce de rustine qui permet de ne pas tout bloquer, mais qui en revanche, bloque toute dépense non contractuelle", a expliqué le ministre. Concrètement, l'État ne peut ni engager de nouvelles aides, ni décaisser les fonds nécessaires au financement des dossiers MaPrimeRénov'.
"Sans budget, on ne pourra pas décaisser l'argent", a-t-il insisté. "Donc on ne va pas ouvrir un guichet en disant “déposez vos dossiers et puis on vous dira dans deux mois, dans trois mois, si on est capable de les financer ou pas”. Ça n'aurait pas de sens."
Cette suspension remet en cause des objectifs pourtant affichés. Selon les projections de l'Agence nationale de l'habitat, environ 120 000 logements devaient être rénovés grâce à MaPrimeRénov' en 2026. Un chiffre désormais hors de portée tant que la situation budgétaire reste bloquée.
Une instabilité devenue structurelle pour les ménages et le bâtiment
Cette nouvelle interruption n'est pas une première. MaPrimeRénov' avait déjà connu plusieurs suspensions en 2025 : un arrêt de plusieurs semaines en début d'année, puis une suspension partielle durant l'été. À chaque fois, les ménages porteurs de projets ont dû composer avec une forte incertitude, tandis que les professionnels du bâtiment voyaient leur activité ralentie.
L'instabilité du dispositif s'inscrit dans un contexte de restrictions budgétaires. L'enveloppe allouée à MaPrimeRénov' est passée de 3,29 milliards d'euros en 2024 à 2,3 milliards en 2025, soit près d'un milliard d'euros de baisse. Une contraction qui fragilise un secteur déjà sous tension.
Les représentants du bâtiment alertent sur les effets en chaîne. Le président de la CAPEB a ainsi déploré un nouveau coup dur pour les artisans, alors que la rénovation énergétique reste l'un des principaux leviers d'activité pour les petites entreprises du bâtiment.
Depuis sa création en 2020, MaPrimeRénov' a permis d'accompagner la rénovation de plus de 2,5 millions de logements. Mais la répétition des suspensions souligne désormais les limites d'un dispositif étroitement dépendant des arbitrages budgétaires. Dans ce contexte, Vincent Jeanbrun appelle à l'adoption d'un budget "le plus rapidement possible", condition indispensable à une éventuelle réouverture du guichet. En attendant, ménages et professionnels restent suspendus aux décisions parlementaires.
La rédaction d'Assurland