2,5 milliards d'euros. C'est le coût estimé de la fraude à l'assurance automobile en France, selon la Fédération Française de l'Assurance (FFA). Ce montant colossal représente à lui seul 2 à 3 % du total des indemnisations versées chaque année par les assureurs. Un phénomène en constante progression, aujourd'hui exacerbé par la montée en puissance de l'intelligence artificielle. Cette technologie, accessible au grand public, bouleverse l'écosystème assurantiel, aussi bien du côté des fraudeurs que des professionnels du secteur.
L'intelligence artificielle, nouvel outil des fraudeurs
En quelques clics, il est désormais possible de générer des images hyperréalistes simulant des accidents de voiture ou des dommages corporels fictifs. Ce scénario digne d'un film de science-fiction est déjà une réalité pour les assureurs, confrontés à une vague de fraudes sophistiquées.
La compagnie britannique Liverpool Victoria (LV), filiale du groupe Allianz, a révélé le cas d'un assuré ayant utilisé une image générée par IA pour simuler un choc sur son van, accompagnée d'une fausse facture de réparation de 1 000 livres. Et ce n'est là qu'un exemple parmi d'autres. À présent, les fraudeurs vont plus loin : ils créent de fausses identités pour soumettre plusieurs réclamations frauduleuses, et recourent à des deepfakes vidéo pour rendre leurs demandes crédibles.
Selon Alfa, l'agence de lutte contre la fraude à l'assurance, le montant des fraudes détectées en assurance auto en France est passé de 188 millions d'euros en 2022 à 236,8 millions en 2023. "Nous assistons à une industrialisation de la fraude, elle s'est professionnalisée ces dernières années et devient l'œuvre de bandes organisées", alerte Maxence Bizien, directeur général d'Alfa, dans une déclaration à l'UFC-Que Choisir.
La contre-offensive technologique des assureurs
Face à cette menace croissante, les compagnies d'assurance n'ont pas tardé à réagir. Leur arme ? Elles aussi misent sur l'intelligence artificielle pour reprendre l'avantage. Plusieurs outils sont en cours de développement, à l'image de la solution WeProov Claim, proposée par le pionnier français de l'inspection automobile digitale, WeProov.
Concrètement, cette application permet aux assurés de documenter un sinistre de manière infalsifiable. Elle prend le contrôle de l'appareil photo du téléphone, impose un tour de caisse complet, horodate et géolocalise les images. "En quelques clics, l'assuré réalise un tour de caisse complet et génère dans la foulée un rapport horodaté, géolocalisé et transmis au chargé d'indemnisation", décrit Alexandre Meyer, dirigeant de WeProov.
Grâce à cette technologie, les assureurs peuvent désormais vérifier l'authenticité des documents envoyés, et ainsi réduire considérablement les risques de fraude. Les données sont traitées par une IA interne qui identifie les incohérences et classe les sinistres en fonction de leur coût, permettant un gain d'efficacité opérationnelle non négligeable.
Et si l'IA devenait un outil de sensibilisation ?
Si l'IA représente un danger réel lorsqu'elle est utilisée à des fins frauduleuses, elle peut aussi être un outil pédagogique et de sensibilisation. En septembre 2024, l'internaute Cole Kessel a publié sur Instagram des images de Porsche 911 crashées contre les murs du Louvre. Ces visuels, générés avec Midjourney, visaient à alerter sur les dangers de la vitesse au volant. Une utilisation artistique et responsable de l'IA, montrant que cette technologie peut aussi servir la sécurité routière.
Mais pour l'heure, les assureurs restent sur leurs gardes. Comme le souligne Alexandre Meyer : "Aujourd'hui, il suffit de taper une simple instruction pour obtenir une image convaincante d'un véhicule endommagé. Face à cette (r)évolution technologique, il devient de plus en plus difficile de distinguer une photo authentique d'une image falsifiée."

La rédaction d'Assurland