Face à la hausse continue des dépenses de santé en France, les mutuelles envisagent de revoir à la baisse le remboursement de certains équipements, notamment les lunettes et les prothèses auditives. Une proposition portée par le président de la Mutualité française, Éric Chenut, qui appelle à recentrer les contrats santé sur l'essentiel.

Les dépenses de santé en forte progression

Entre 2019 et 2023, la dépense courante de santé en France a bondi de 20 %. Elle représentant désormais 11,5 % du produit intérieur brut (PIB), contre 11,2 % quatre ans plus tôt, selon les derniers chiffres de la Drees, la direction statistique des ministères sociaux. Une dérive jugée préoccupante par les acteurs du secteur. Pour Éric Chenut, "il n'y a qu'en agissant sur la dynamique de dépense de santé qu'on arrivera à rendre notre système soutenable".

Dans ce contexte, la Mutualité française (composante qui regroupe les complémentaires santé mutualistes) souhaite modifier les règles de remboursement des équipements optiques et auditifs. L'objectif ? Freiner les effets d'une "pseudo-gratuité" qui encouragerait, selon elle, la surconsommation.

Vers un allongement des délais de renouvellement

Concrètement, la Mutualité propose d'allonger les délais de renouvellement des lunettes et audioprothèses. Les assurés pourraient ainsi se faire rembourser une nouvelle paire de lunettes tous les trois ans, contre deux ans actuellement, et bénéficier du remboursement d'une nouvelle prothèse auditive tous les cinq ans, au lieu de quatre.

Cette mesure viserait à freiner certaines pratiques commerciales jugées abusives. "Est-ce qu'il est normal de recevoir sur son smartphone des SMS d'opticiens qui, au moment de l'arrivée des deux ans où on a eu une paire de lunettes, disent : “Venez pour une paire de lunettes gratuites” ", interroge Éric Chenut. Il ajoute : "On est dans une pseudo-gratuité où les gens ne se rendent plus compte de combien cela coûte."

Le président de la Mutualité française pointe également la densité exceptionnelle du marché de l'optique en France. "Il y a 13 000 magasins d'optique dans notre pays, c'est autant que sur tous les États-Unis. Il y a un business", souligne-t-il.

Une remise à plat des garanties du contrat responsable

Au-delà de ces délais de remboursement, la Mutualité française propose également de recentrer les garanties du contrat responsable et solidaire (contrat de complémentaire santé bénéficiant d'un avantage fiscal) sur un socle de soins essentiels. Cela impliquerait de réduire certains remboursements, comme celui des montures de lunettes, qui passerait de 100 euros à 30 euros, et de supprimer la prise en charge de produits jugés non indispensables, comme les culottes menstruelles.

Cette remise à plat concernerait aussi les soins dentaires et la pose de prothèses auditives. Selon les estimations de la Mutualité, ces évolutions pourraient permettre de réduire les cotisations de 20 à 25 %, au prix toutefois d'une couverture allégée.

Les assureurs privés, qui couvrent environ un tiers du marché de la complémentaire santé, partagent majoritairement cette orientation. Les deux fédérations doivent remettre dans les prochains jours des propositions communes à l'exécutif.

Pour Éric Chenut, il ne s'agit pas de rembourser moins mais de mieux cibler les dépenses. "On ne veut pas moins rembourser, on dit simplement qu'il faut se recentrer sur les soins essentiels", conclut-il.



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